Cité-HLM à rénover ou monument protégé ? Ce Serpentin bleu de 1,5 km réalisé par l'architecte EmileAillaud dans les années 1960 pose un problème de conscience aux autorités.
Oeuvre "poétique" pour les uns, lieu "d'enfermement" pour les autres, cet immeuble sinueux de 5 étages et 635 logements sociaux embrassant un parc de 4 hectares, constitue le coeur du grand ensemble des Courtillières (1954-1968), qui compte également à proximité une quinzaine de tours en étoiles (1.600 logements HLM au total).
Inspiré des systèmes clos des villes médiévales italiennes, le Serpentin a mal vieilli. Les halls traversants, repaires de trafics, ont été bouchés pour des raisons de sécurité, les caves murées. A l'intérieur, tous les appartements sont à rénover. L'isolation du bâtiment laisse à désirer. Aussi, la réhabilitation (200 millions d'euros), discutée depuis 2001, a reçu l'aval de l'Agence de rénovation urbaine (Anru) en 2006, et devait commencer en 2007.
Mais le ministère de la Culture, saisi aux fins de classement par un professeur émérite à la Sorbonne, a fait suspendre les travaux en octobre 2006, et diligenté une mission. Depuis, la destruction de neuf cages d'escaliers, pour créer de nouveaux passages et désenclaver la cité, est gelée.
De même, la pose de parements de briques rouges en façade est remise en cause. Pour les rapporteurs de la mission Chassel, le Serpentin est une "oeuvre majeure" dans l'histoire de
l'architecture française, "un cas à enjeu patrimonial particulièrement élevé". Il est surtout, relèvent-ils, l'un des rares témoignages préservés de l'architecte utopiste mort en 1988, qui à
propos des Courtillières disait avoir voulu "un lieu apparemment totalement clos" mais dont "on sente quand même qu'on peut en sortir, pour que le désespoir du labyrinthe ne soit pas complet".
Dans leurs conclusions, remises en avril 2007, les rapporteurs estiment que les travaux entraîneront "des changements irréversiblement dénaturants". Ils préconisent de modifier sensiblement le projet.
Là où Emile Aillaud a imprimé sa marque de paysages urbains aux lignes arrondies et colorées, en rupture avec les traditionnels grands ensembles gris et monotones, son oeuvre a été rarement conservée. La Grande-Borne à Grigny (Essonne) et La Noé à Chanteloup-les-Vignes (Yvelines) sont "méconnaissables", se désolent les rapporteurs de la mission.
"On tergiverse depuis dix mois", s'impatiente à Pantin le maire Bertrand Kern, agacé par les réflexions sur le "bleu léger" du Serpentin qu'on lui demande de conserver. "C'est une vue culturelle qui fait fi des gens qui vivent, des conditions actuelles d'isolation et des coûts d'entretien", déplore-t-il.
En attendant l'arbitrage des ministères concernés (Culture et Logement), seule a pu commencer la rénovation des intérieurs, avec retard. Bertrand Kern a invité en juillet Christine Boutin à visiter les Courtillières, pour trancher.
"On a déjà fait beaucoup de concessions pour préserver le site", alors que "cela aurait été plus facile de tout démolir", assure M. Kern. La destruction totale n'était pas souhaitée par les habitants. Attachés à leur cité, une grande majorité a refusé d'être relogée ailleurs.
Bleu, rose ou rouge? La question les fait sourire. "De toute façon, les monuments aussi ont besoin d'être rénovés", note une adolescente de la cité.
Oeuvre "poétique" pour les uns, lieu "d'enfermement" pour les autres, cet immeuble sinueux de 5 étages et 635 logements sociaux embrassant un parc de 4 hectares, constitue le coeur du grand ensemble des Courtillières (1954-1968), qui compte également à proximité une quinzaine de tours en étoiles (1.600 logements HLM au total).
Inspiré des systèmes clos des villes médiévales italiennes, le Serpentin a mal vieilli. Les halls traversants, repaires de trafics, ont été bouchés pour des raisons de sécurité, les caves murées. A l'intérieur, tous les appartements sont à rénover. L'isolation du bâtiment laisse à désirer. Aussi, la réhabilitation (200 millions d'euros), discutée depuis 2001, a reçu l'aval de l'Agence de rénovation urbaine (Anru) en 2006, et devait commencer en 2007.
Mais le ministère de la Culture, saisi aux fins de classement par un professeur émérite à la Sorbonne, a fait suspendre les travaux en octobre 2006, et diligenté une mission. Depuis, la destruction de neuf cages d'escaliers, pour créer de nouveaux passages et désenclaver la cité, est gelée.
De même, la pose de parements de briques rouges en façade est remise en cause. Pour les rapporteurs de la mission Chassel, le Serpentin est une "oeuvre majeure" dans l'histoire de
l'architecture française, "un cas à enjeu patrimonial particulièrement élevé". Il est surtout, relèvent-ils, l'un des rares témoignages préservés de l'architecte utopiste mort en 1988, qui à
propos des Courtillières disait avoir voulu "un lieu apparemment totalement clos" mais dont "on sente quand même qu'on peut en sortir, pour que le désespoir du labyrinthe ne soit pas complet".
Dans leurs conclusions, remises en avril 2007, les rapporteurs estiment que les travaux entraîneront "des changements irréversiblement dénaturants". Ils préconisent de modifier sensiblement le projet.
Là où Emile Aillaud a imprimé sa marque de paysages urbains aux lignes arrondies et colorées, en rupture avec les traditionnels grands ensembles gris et monotones, son oeuvre a été rarement conservée. La Grande-Borne à Grigny (Essonne) et La Noé à Chanteloup-les-Vignes (Yvelines) sont "méconnaissables", se désolent les rapporteurs de la mission.
"On tergiverse depuis dix mois", s'impatiente à Pantin le maire Bertrand Kern, agacé par les réflexions sur le "bleu léger" du Serpentin qu'on lui demande de conserver. "C'est une vue culturelle qui fait fi des gens qui vivent, des conditions actuelles d'isolation et des coûts d'entretien", déplore-t-il.
En attendant l'arbitrage des ministères concernés (Culture et Logement), seule a pu commencer la rénovation des intérieurs, avec retard. Bertrand Kern a invité en juillet Christine Boutin à visiter les Courtillières, pour trancher.
"On a déjà fait beaucoup de concessions pour préserver le site", alors que "cela aurait été plus facile de tout démolir", assure M. Kern. La destruction totale n'était pas souhaitée par les habitants. Attachés à leur cité, une grande majorité a refusé d'être relogée ailleurs.
Bleu, rose ou rouge? La question les fait sourire. "De toute façon, les monuments aussi ont besoin d'être rénovés", note une adolescente de la cité.
Sylvie Husson (AFP)
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